Les mariages précoces et forcés

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I matrimoni precoci e forzatiEn mai 2020, la « Commission spéciale pour la protection et la promotion des droits humains » du Sénat de la République italienne a publié un rapport sur l’activité menée dans le domaine des mariages précoces et forcés.

Après avoir donné une définition de « mariage forcé » et de « mariage précoce », le dossier fait l’analyse du phénomène - tout en soulignant la difficulté de le quantifier – et du cadre réglementaire italien, dans le domaine aussi bien civil que pénal.

Selon l’article 37 de la Convention d’Istanbul, la définition de mariage forcé se fonde sur deux éléments : l’acte délibéré d’obliger un adulte ou un enfant à se marier et le fait d’attirer un adulte ou un enfant de façon intentionnelle par la tromperie sur le territoire d’un État partie ou d’un État autre que celui où il réside, afin de l’obliger à se marier.

Quand on parle de « mariage précoce » on entend les unions, formalisées ou non, où l’un des futurs époux, ou considérés comme tels, a moins de 18 ans. Il s’agit d’unions qui ne sont pas toujours formalisées et qui n’ont pas nécessairement des effets juridiques ; elles sont toutefois perçues comme de véritables mariages par les familles et leur milieu social.

Le 30 juillet 2019, à la fin de ses travaux, la « Commission des Droits de l’Homme » a approuvé une Résolution, qui a été soumise au Président du Sénat et aux ministres des Relations avec le Parlement, de la Justice et de l’Éducation, dans laquelle on demande au gouvernement de s’engager dans la prévention, notamment à travers les actions suivantes :

  • formation des acteurs des institutions du territoire, susceptibles de capter les signaux provenant des victimes potentielles, afin de prévenir un mariage précoce et forcé : il s’agit en premier lieu des enseignants, des forces de l’ordre, des juges ;
  • formation des familles, par le truchement des écoles et du réseau d’aide sociale territoriale, afin de les sensibiliser sur les effets négatifs des mariages forcés sur la vie des petites filles ;
  • assistance aux victimes et, à travers des parcours scolaires et de formation appropriés, insertion des victimes potentielles dans le monde du travail, en vue d’une véritable autonomisation économique et de l’acquisition d’un statut social correspondant ;
  • création d’un Observatoire national qui, en regroupant les compétences de différents Ministères, est susceptible d’une part d’assurer le suivi de ce phénomène, l’étudier et le contrecarrer, ainsi que d’autres formes de violence, comme les mutilations génitales féminines  et, de l’autre, d’adopter des mesures visant à lutter contre les organisateurs de voyages finalisés aux mariages précoces et forcés.

 

En ce qui concerne la criminalisation des mariages forcés et des mariages précoces, en plus du délit prévu à l’article 7 de la loi n° 69/2019, il faut considérer d’autres typologies de délit, adressées dans les travaux de la Commission des droits de l’homme, tels que les agressions sexuelles sur mineur, l’enlèvement d’enfant, l’enlèvement, la traite d’êtres humains, la violence dans la sphère privée.

La première opération lancée par la Police Nationale italienne au lendemain de l’introduction du délit visé à l’article 588-bis, est une illustration intéressante.

Le 21 septembre 2019, la Brigade mobile de Pise, à l’issue d’une enquête, a interpelé, suite à un mandat d’arrêt, un ressortissant bosniaque de 46 ans, accusé de calomnie, maltraitance intrafamiliale, enlèvement, mariage forcé (articles 81, 368, 572, 605, 558-bis du code pénal) à l’encontre de ses deux filles de 20 et 22 ans. L’enquête avait été lancée après que le ressortissant bosniaque avait porté plainte pour l’enlèvement de ses filles, alors qu’il fut avéré qu’elles avaient fui le camp de Roms où leur père les avait séquestrées, dans un contexte d’abus et de violences, pour les obliger à se marier avec des hommes qu’il avait choisi à leur place.

Si d’une part les cas de figure définissant ce phénomène d’un point de vue pénal peuvent différer, de l’autre, l’analyse des faits constitutifs de délits visés à l’article 558 bis du code pénal sur la base de signalements fait ressortir que les faits ne relèvent pas toujours de « délits culturellement orientés et motivés », c’est-à-dire les délits commis dans des milieux culturels, ethniques ou religieux particuliers et qui, tout en étant punis par la loi, ne sont pas considérés comme tels au sein du contexte socio-culturel et juridique du coupable. Certains cas relèvent en fait de la volonté de la personne signalée à l’autorité judiciaire d’acquérir un titre de séjour valable dans notre Pays, d’autres se déroulent dans un contexte d’abus et de violences.

Pour faire émerger ce phénomène et offrir des outils d’information pertinents aux professionnels des secteurs concernés (soignants, travailleurs sociaux, médiateurs culturels) chargés de l’accueil des femmes et des filles immigrées des Pays à risque de MGF et de mariages forcés et qui exercent leur activité auprès des CPSA (Centre de premiers soins et d’accueil), CDA (Centre d’accueil) et CARA (Centre d’accueil pour demandeurs d’asile), en décembre 2017, le Département pour l’égalité des chances de la Présidence du Conseil des Ministres a publié les « Lignes directrices sur l’identification précoce des victimes de mutilations génitales féminines ou d’autres pratiques préjudiciables ».

Les liens pour approfondir le sujet

Rapport de la Commission des droits de l'homme

http://www.senato.it/documenti/repository/commissioni/dirittiumani18/Il_lavoro_della_Commissione_diritti_umani_del_Senato_sui_matrimoni_precoci.pdf

Sito del Dipartimento Pari Opportunità (Site web du Département  pour l'Egalité des chances)

http://www.pariopportunita.gov.it/wp-content/uploads/2018/01/file-unico_mgf_fra.pdf

 

English version

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08/03/2022